C’est le gros sujet de ce mois d’octobre : le vote du budget 2025. Si les négociations sont longues et tendues, côté Françaises et Français de l’étranger, les annonces sont aussi inquiétantes.
Une baisse globale de 7,8% du budget du programme 151
Le projet de loi de finances 2025 pour les Français établis hors de France suscite de vives et légitimes préoccupations, malgré quelques avancées. Alors que l’examen du texte par le Parlement débute tardivement en raison des retards conséquents inhérents à l’agitation politique, une première analyse du projet de budget pour 2025 révèle des réductions budgétaires significatives qui pourraient impacter sérieusement le soutien à nos concitoyens établis hors de France.
Le gouvernement a certes tenu certains engagements, notamment l’élargissement du service « France consulaire » et l’augmentation de l’enveloppe pour les aides aux élèves en situation de handicap. Cependant, ces points positifs sont largement éclipsés par une baisse globale de 7,8% du budget du programme 151 par rapport à 2024.
Cette diminution se traduit par des coupes dans des domaines essentiels pour les Français de l’étranger. Les affaires sociales voient pour le moment leur enveloppe réduite de 1,6 million d’euros, tandis que l’éducation subit également des restrictions importantes. Le budget des bourses scolaires, déjà considéré par le gouvernement lui-même comme insuffisant ces dernières années, est encore amputé de 5,5%. Plus surprenant encore, le « Pass Éducation de langue française », lancé en grande pompe en 2024, est purement et simplement supprimé avant même que son expérimentation n’ait pu être véritablement lancé.
Le soutien aux associations, véritables piliers de la présence française à l’étranger, n’est pas épargné. Les projets STAFE subissent une coupe drastique de 20%, soit une perte de 400 000 euros, tandis que les OLES se voient privées de 200 000 euros par rapport à l’année précédente.
Les conseillères et conseillers des Françaises et Français de l’étranger, premiers représentant•es de nos compatriotes, voient quant à eux leur indemnités rester à niveau constant, ce qui équivaut dans les faits à une baisse, compte tenu de l’inflation.
Le programme 185 « Diplomatie culturelle et d’influence » n’est pas en reste, avec une baisse globale de 6,2%, soit 45 millions d’euros.
Cette réduction affecte de nombreux domaines cruciaux : l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) voit sa subvention diminuer de 14 millions d’euros et une réduction de 15 ETPT sous plafond, ce qui réduirait sa capacité de fonctionnement et les moyens alloués à la gestion du réseau d’enseignement français.
Le soutien aux Alliances françaises et Instituts français est réduit de 6,2%. La coopération culturelle et la promotion du français subissent une coupe de 12,5%, passant de 86,3 à 75,6 millions d’euros, tandis que le budget alloué à l’enseignement supérieur et à la recherche chute de 12,3% Les fonds destinés à la diplomatie économique et à l’attractivité sont pratiquement divisés par deux, avec une baisse alarmante de 10,4 à 5 millions d’euros.
Ces restrictions budgétaires interviennent dans un contexte économique déjà tendu, marqué par une inflation mondiale croissante et des taux de base souvent défavorables pour le versement d’aides sociales à la hauteur des besoins. Elles soulèvent de sérieuses inquiétudes quant à la capacité de l’État à soutenir efficacement ses ressortissants à l’étranger, en particulier les plus vulnérables.
Au-delà de l’impact direct sur les individus, ces coupes budgétaires risquent d’affaiblir considérablement le rayonnement culturel de la France à l’international. La réduction des moyens alloués aux institutions culturelles et éducatives pourrait nuire à la diffusion de la langue et de la culture françaises, ainsi qu’à l’attractivité de la France en tant que destination d’études et de recherche. En dépit de l’accueil du XIXe Sommet de la Francophonie et de promotion de la langue française, la coopération culturelle et promotion du français connaîtrait par exemple une baisse significative de 12,5%, de 86,3M€ à 75,6M€.
Enfin, une modification technique dans la présentation du budget semble restreindre le droit d’amendement des parlementaires, limitant leur capacité à proposer des augmentations de dépenses pour certaines actions spécifiques. Cette évolution soulève des questions quant aux obstacles posés à la capacité du Parlement à influencer efficacement les orientations budgétaires en faveur des Français de l’étranger.
Sur les effectifs dans le réseau consulaire, le PLF 2025 soulève autant d’inquiétudes quant à l’avenir de la qualité des services consulaires.
Le transfert de 3296 ETPT vers le programme 105 s’accompagne de réductions nettes dans plusieurs catégories d’emplois. L’administration centrale est la plus touchée avec une diminution de 14,53 ETPT, ce qui pourrait affaiblir la capacité de pilotage et de coordination des services.
Le réseau à l’étranger subit d’ailleurs une baisse de près de 6 ETPT, là où le Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères s’était engagé à des augmentations à la suite des États Généraux de la Diplomatie (EGD), risquant d’impacter directement les usagers des services consulaires. Il n’est donc plus question de réarmement de la diplomatie ! Des réductions conséquentes qui, dans un contexte de demande croissante, pourraient compromettre l’efficacité et la réactivité des services consulaires, notamment dans les domaines déjà à flux tendus tels que l’état civil, la délivrance de visas et l’assistance aux Françaises et Français en difficulté à l’étranger.
Bien que s’inscrivant dans un contexte général de réduction des dépenses publiques, ce projet de budget 2025 soulève de nombreuses interrogations. Il remet à nouveau en question la capacité de la France à maintenir un soutien efficace à ses ressortissants à l’étranger et à préserver son influence culturelle et économique sur la scène internationale. Alors que le texte s’apprête à être examiné par l’Assemblée Nationale et le Sénat, de nombreux acteurs de la communauté française à l’étranger appellent à une révision de ces orientations budgétaires, jugées peu en phase avec les besoins réels et les ambitions affichées de la France en matière de services publics.
Ma tribune avec la Sénatrice Mélanie Vogel dans « Le Petit Journal »






